"Pour discuter des questions où la science et la théologie catholique se rejoignent, il faut avoir fait dix à quinze ans d'études dans les sciences pures."
Pierre Duhem
Source (à la fin de l'article - remarque : ce n'est pas la citation originale ; j'ai traduit de l'anglais qui était une traduction du français...)
Note ajoutée le 23 septembre
Je viens seulement de réaliser que ce blog fêtait son premier anniversaire il y a trois jours au moment où je mettais cette citation de Duhem en ligne. Et pour la première fois, les 10 commentaires sont atteints. Merci ! Et merci à ceux qui me lisent, même sans laisser de commentaire...
Encore un ajout, le 26 septembre
Dans un article du 21 septembre, La Croix nous rapporte le création de l'Académie Catholique de France. Extrait :
"(...) Avec cette Académie, il s’agit justement de faire dialoguer des gens de tous horizons, avec des savoirs de diverses matières, remarque le biologiste Edgardo Carosella, chercheur à l’hôpital Saint-Louis : « Nous-mêmes sommes rarement confrontés à d’autres expertises. » Il ne s’agit pas d’être un intellectuel au sens où on l’entend depuis l’affaire Dreyfus, à savoir, explique Rémi Brague, « celui qui excipe de sa compétence scientifique pour revendiquer une autorité morale ».
Reste un minimum, poursuit le philosophe : « Un expert, qui l’est toujours dans un domaine très limité du savoir, et qui a le devoir d’éclairer les autres sur ce domaine, spécialement quand une vulgate médiatique contient des erreurs ou des demi-vérités. » (...)"
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16 commentaires:
N'est-ce pas un moyen de disqualifier toute personne prétendant s'engager dans cette voie ? La même réflexion pourrait être faite à propos de la rencontre entre la philosophie ou le droit et la science...
Bref, c'est un blanc seing donné aux scientifiques.
Sans doute, la matière est-elle difficile mais il y a une autre voie, c'est la réflexion pluridisciplinaire.
Vous avez entièrement raison. D'ailleurs l'article de Stephen Barr dans la revue First Things cité en référence ajoute une réflexion de Peter Hodgson : “It is also highly desirable that [one] be philosophically and theologically literate, and that is a much more difficult criterion to satisfy." [Il est aussi très souhaitable qu'on soit qualifié en philosophie et en théologie, et cela est un critère beaucoup plus difficile à satisfaire].
Cette citation était surtout destinée à ceux qui ne connaissent rien à la science mais émettent des jugements définitifs sur des sujets comme le big bang, l'évolution, les cellules souches ou les vaccins.
On ne devrait parler que de ce qu'on connaît, et j'espère par exemple ne jamais être pris en train de prononcer une solennelle bêtise juridique... Je compterai alors sur vous pour me remettre à ma place !
Mono,pluri ou multi, tout ça c'est très bien, mais qui est Pierre Duhem ?
Une autre citation :
"Souvent en désaccord avec HG Wells, je crois équitable de rendre ici hommage à l'imagination audacieuse et constructive de son oeuvre à la fois variée, vaste et passionnante, et de le remercier plus encore d'avoir affirmé le droit de l'amateur à l'usage raisonnable des faits établis par le spécialiste."
Chesterton, L'Homme éternel, Avertissement.
L'amateur a certes le droit d'user des faits établis par le spécialiste, à condition de bien choisir celui-ci !
Moi qui suit non-évolutionniste et pas scientifique, puis-je donc continuer à émettre mes avis tant que vous ne les considérer pas comme 'jugements définitifs" ?
Il est généralement bon de se frotter avec des gens qui ne pensent pas comme soi et ne sont pas forcément du même domaine. Si c'est courtois cela fait normalement grandir. Mais qu'il me serait insupportable de ne discuter qu'avec mes "pairs" et ne jamais redescendre de ma "spécialité" !
Cosaque
Pardonnez mes 2 coquilles :
"suis"
et
"publics"...
J'ai repris avec une collègue que vous connaissez pour l'avoir entendu également à Rennes la question des autorisations de l'ABM : http://wp.me/pzTJY-Y
N'hésitez pas à nous faire part de vos observations. Cela reste assez simple au plan scientifique (il n'y a pas de résultat, ni de progrès thérapeutique majeur en vue ; il y a des méthodes alternatives).
Toujours sur la question de la pluridisciplinarité, la semaine dernière à la conférence de Mariton à l'Assemblée nationale, un médecin m'a dit que si la loi pose ces conditions, c'est que la loi est fausse ! Il était très énervé ; d'une manière assez surprenante...
Albert,
Je découvre que la Scolastique de St Thomas d'Aquin est régulièrement citée par les papes comme une discipline sûre pour concilier FOI et RAISON.
Foi et raison qui est votre préoccupation en tant que scientifique catholique et la mienne en tant que simple catholique qui se pose des questions.
Je ne suis point un spécialiste mais d'après mes rapides lectures St Thomas ( docteur de l'Eglise) semble subordonner les sciences (théologie, philosophie, lettres, droit, médecine...) à la Reine des Sciences qui est la théologie. Apparemment il n'était pas pour une FRAGMENTATION ou SPECIALISATION des sciences mais au contraire pour une SYNTHESE d'où la création des premières universités catholique au XII eme s.
Si cela peut vous servir. Moi ça me parle. Ce qui est intéressant est justement la volonté de la scolastique à concilier ce vaste programme qu'est FOI et RAISON.
Cordialement.
Cosaque
Benoît XVI déclarait le 28 janvier 2007 :
« Avec une sagesse clairvoyante, saint Thomas d'Aquin réussit à instaurer une confrontation fructueuse avec la pensée arabe et juive de son temps, au point d'être considéré comme un maître toujours actuel de dialogue avec d'autres cultures et religions. [...] Il sut présenter cette admirable synthèse chrétienne entre raison et foi qui, pour la civilisation occidentale représente un patrimoine précieux où l'on peut puiser aujourd'hui également pour dialoguer de manière efficace avec les grandes traditions culturelles et religieuses de l'est et du sud du monde[32]. »
Source Wikipedia
Cosaque
Ce n'est pas le tout de remercier pour les commentaires, encore faut-il y répondre !
- Pierre Duhem : grand physicien français à la charnière entre le XIXe et le XXe siècle ; on lui doit notamment une fameuse équation en thermodynamique (équation de Gibbs-Duhem). Mais c'était aussi et surtout un immense historien des sciences. Son histoire de la physique des origines jusqu'au XVe siècle en dix volumes est sans équivalent. Stanley Jaki lui a consacré une biographie traduite en français aux Éditions Beauchesne.
- St Thomas, foi et raison. Certes la théologie est au-dessus de la philosophie, elle-même étant au-dessus des sciences expérimentales. Mais cela ne permet pas au théologien ou au philosophe de s'affranchir d'une vérité scientifiquement établie, car il ne peut y avoir de contradiction dans ce qui est considéré comme vrai. Reste ensuite à accepter, sur les questions pour lesquelles nous ne sommes pas compétents, l'avis d'experts dont on peut établir par ailleurs qu'ils sont dignes de cette confiance. Bien sûr les experts multidisciplinaires sont rares (Duhem en était un) donc il vaut mieux ne pas travailler tout seul dans son coin si on quitte son pré carré !
Le problème du juriste est qu'il travaille rarement sur des questions purement juridiques ! Le droit n'a que rarement pour objet le droit lui-même.
Il devrait s'ouvrir davantage, c'est certain. Il reste qu'il est souvent l'objet d'un certain mépris de la part des scientifiques notamment à l'université.
Le théologien reçoit sans doute un traitement équivalent voire pire. Je n'ose imaginer l'intervention d'un théologien dans certaines discussions que nous avons pu avoir à l'université!
a NM de la part d'un simple homme de métier
Après lecture de l'ensemble des commentaires et notamment des vôtres, je voudrais poser une question en partant de ce que j'ai pu observer.
Est-ce que Duhem en tant qu'historien des sciences n'aurait pas mis le doigt sur une difficulté inhérente au savoir et aux techniques modernes ?
Dans les métiers, il est évident que la fragmentation et la spécialisation galopent. Un menuisier-charpentier d'autrefois pouvait remettre en ordre à peu près tout ce qui était en bois dans une maison. Aujourd'hui, le poseur de fenêtre ne répare pas un parquet, etc. Impossible de former des artisans capables de se tenir au courant de l'ensemble des techniques de fabrication et de pose dans plusieurs domaines qui évoluent à toute vitesse.
Ailleurs que dans les domaines intangibles (premiers principes de la raison, ect), n'y a-t-il pas une impossibilité pratique (sauf génie...) de penser en bonne connaissance de cause dans plusieurs domaines faute de pouvoir acquérir les connaissances de plus en plus "pointues" et changeantes que cela exigerait.
A ce que j'ai entendu dire, les juristes praticiens eux-mêmes ont du mal à sortir de leur domaine tant chacun est devenu complexe. Et que dire des matheux-physiciens ou vice-versa qui ne se comprennent presque plus entre eux ?
J'ai des scrupules à poursuivre cette discussion sur le blog d'Albert...
En quelques mots :
i) L'idéal humaniste de l'érudition (type Pic de la Mirandole) a été en même temps compromis par l'idée de progrès qu'il portait en lui (un historien pourrait infirmer/confirmer ce point);
ii) Notre ignorance croit plus vite que nos connaissances (l'image du cercle de la connaissanec en contact avec l'inconnu me plait bien). Cela explique peut-être la spécialisation croissante.
Surtout n'ayez aucun scrupule à envoyer des commentaires...
Le débat entre l'expert et l'amateur peut se présenter comme une discussion entre un philosophe et un biologiste. Chacun est un expert dans son domaine et un amateur dans celui de l'autre. Il y a des questions sur lesquels le biologiste, en tant que biologiste, ne devrait pas se prononcer, comme l'existence de Dieu. Sur la question de l'évolution en revanche, le philosophe devrait laisser parler le biologiste. Mais il y a aussi des sujets sur lesquels les deux peuvent intervenir : l'apparition de la vie, de l'homme etc. L'idéal serait bien sûr que le biologiste ait fait de la philosophie et réciproquement... Ce qui est exaspérant pour tout le monde, c'est l'amateur qui fait des déclarations définitives sur des sujets qu'il ne connaît pas.
Enfin Albert vous me rassurez !
Avoir un blog c'est donc vulgariser son savoir et accepter les opinions des autres via les commentaires...
Ouf, la liberté d'expression existe encore. Mais je suis bien d'accord avec vous, certaines opinions agacent ou sont parfois peu CONSTRUCTIVES.
Ainsi importance du FOND et de la FORME vont de pair, le tout dans une finalité CONSTRUCTIVE (arguments et sources à l'appui).
Cosaque
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