Les pronostics vont bon train en ce début d'année, notamment en ce qui concerne les potentielles découvertes scientifiques de 2010. À ce petit jeu le nom de Craig Venter revient souvent, associé à la fabrication ou synthèse de la vie autrement appelée "vie artificielle". Il a à plusieurs reprises fait parler de lui. Notamment en concurrençant le programme public de décryptage du génome humain. Mais il a aussi annoncé la synthèse du génome d'une bactérie en 2009, grâce à des manipulations génétiques très astucieuses. La question est désormais de savoir s'il va réussir à "synthétiser la vie". Elle est notamment posée par le Guardian, par Nature Methods, et aussi par le blogueur scientifique français Tom Roud à l'occasion de la fermeture du blog du Monde consacré à l'année Darwin.
Mais de quoi s'agit-il exactement ? Finalement davantage d'une prouesse technique que d'une avancée conceptuelle. Il s'agit en effet de synthétiser un nouveau génome qui n'existe pas aujourd'hui dans la nature, en cherchant principalement à réduire la taille de ce génome pour découvrir le "génome minimal" d'une bactérie. On saura ainsi le nombre de gènes qui sont absolument requis pour qu'une bactérie puisse survivre ; on pourra ensuite utiliser cette information pour transformer cette "bactérie minimale" en une autre bactérie capable de faire d'autres choses.
Synthétiser le vivant ? On en est très loin
Mais pour que ce génome puisse fonctionner, il lui faut tout ce qui va avec, à savoir les protéines, lipides et glucides qui sont présents dans une bactérie normale, une enveloppe cellulaire, etc. Dans le projet de Venter, rien de tout ça n'est fabriqué : il se contente de remplacer un génome par un autre, exactement comme d'autres introduisent un noyau adulte dans un oocyte dont on a enlevé le propre noyau (du clonage, quoi !). La seule différence est qu'au lieu d'introduire l'ADN de la même espèce, il introduira un ADN entièrement synthétisé en laboratoire. Il aura donc reproduit techniquement un processus évolutif classique qui permet d'obtenir de nouveaux gènes, d'éliminer les gènes inutiles, etc. Venter aura donc créé une nouvelle espèce de bactérie, mais il n'aura nullement "synthétiser le vivant". Pour cela il faudrait aussi fabriquer tout le reste en laboratoire, ce qui est aujourd'hui impossible, et ça le restera encore longtemps ! Et c'est bien davantage le domaine de la chimie prébiotique (voir ici et là par exemple).
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