mercredi 23 mai 2012

Cellules souches embryonnaires ? Même Michael J Fox n'y croit plus

Michael J Fox est un acteur américain célèbre pour son rôle dans la trilogie de Retour vers le futur ou la série Spin City. Aujourd'hui il est surtout célèbre pour sa fondation qui lutte contre la maladie de Parkinson, maladie dont il est lui-même atteint depuis l'âge de 30 ans. Cette fondation est très connue aux États-Unis ; lancée en 2000 elle a distribué plus de 280 millions de dollars pour la recherche sur la maladie de Parkinson. C'est aussi un fervent supporteur de la recherche sur les cellules souches embryonnaires humaines (CSEH). Je devrais dire "c'était" car dans un retournement spectaculaire de situation il vient de déclarer que les perspectives de guérison en utilisant les CSEH étaient trop lointaines : "Il y a eu des problèmes avec les cellules souches au fil du temps. La solution pourrait venir de la recherche sur les cellules souches mais il est plus que probable qu'elle viendra d'une autre source." ["There have been some issues with stem cells, some problems along the way. An answer may come from stem cell research but it's more than likely to come from another area." Entretien avec la chaîne ABC News].
Il n'a pas changé d'avis pour des raisons éthiques, mais pour des raisons pragmatiques : il ne croit tout simplement plus aux promesses thérapeutiques des CSEH. Les principales difficultés évoquées sont d'obtenir une intégration correcte des cellules transplantées et d'avoir des cellules qui pourraient être utilisées chez tous les patients. Et chez nous, non seulement nous allons faire une faute morale en autorisant la recherche utilisant les CSEH, mais aussi  une faute scientifique en consacrant de l'argent et du temps à une solution qui vient d'être abandonnée par un de ses plus fervents supporteurs...

vendredi 18 mai 2012

Première thérapie à base de cellules souches...

...et devinez quoi ? Il s'agit de cellules souches adultes de la moelle osseuse. Une petite entreprise de biotechnologie canadienne, Osiris Therapeutics, a vu son médicaments appelé (en anglais) le Prochymal validé. Ce nouveau traitement peut être administré aux enfants qui vont subir une greffe de moelle osseuse afin de diminuer les risques de complications du fait de cette greffe lorsque le système immunitaire du donneur n'est pas suffisamment proche de celui de l'hôte.
Le traitement est issu de cultures de cellules souches mésenchymateuses extraites de greffons de moelle osseuse prélevés chez de jeunes individus en bonne santé. Un seul don de moelle osseuse permet d'obtenir jusqu'à 10 000 doses de Prochymal. Ce n'est pas une molécule miracle car son efficacité est très partielle et Sanofi qui détient les droits du Prochymal en dehors de l'Amérique du Nord avait arrêté de travailler dessus en février. Mais ce retournement de situation pourrait bien relancer l'intérêt pour ce type d'approche.
 En attendant, s'il existait déjà un usage pour les cellules souches adultes en médecine bien sûr, le premier traitement à base de cellules souches légalement approuvé dans un pays industrialisé a été fabriqué avec des cellules souches adultes. Il ne s'agit plus de cellules et d'une procédure médicale mais d'un médicament qui peut être acheté en pharmacie. C'est donc bien une première importante pour les thérapies basées sur les cellules souches.
Source : un article du New York Times.

jeudi 10 mai 2012

A-t-on vraiment besoin du clonage ou des cellules souches embryonnaires humaines quand même un petit ver de terre vient à notre aide ?

Il y a plusieurs méthodes permettant d'obtenir des types cellulaires de toute sorte : isoler des cellules souches, reprogrammer des cellules (cellules iPS) ou bien les "transdifférencier" (cellules iD) c'est-à-dire les forcer à adopter un nouveau destin sans passer par la case cellule souche. Cette dernière possibilité a été évoquée à plusieurs reprises sur ce blog et je l'avais choisie comme découverte de l'année en 2010. Toutes ces méthodes passent par une étape de culture cellulaire où on fait pousser des cellules dans des milieux artificiels en dehors de l'organisme d'origine. Peut-on observer des événements de transdifférenciation dans un animal vivant ?
Un article récent d'une équipe française de l'IGBMC paru dans PNAS (revue de l'académie des sciences américaine) vient de montrer que chez le nématode C. elegans on peut suivre en direct un tel événement avec la transformation naturelle au cours du développement d'une cellule épithéliale du rectum en neurone. Ils sont réussi à isoler plusieurs facteurs génétiques contrôlant cette transformation et là, surprise ! Ils ont trouvé qu'une combinaison de quatre facteurs de transcription permet cette transdifférenciation ; mieux encore, ces quatre facteurs font partie de ceux qui ont été identifiés comme essentiels pour avoir des cellules souches chez les mammifères.
Pourquoi est-ce important ? D'abord c'est la première fois qu'on observe et dissèque génétiquement un événement de transdifférenciation in vivo dans un organisme pluricellulaire. Deuxièmement cela démontre une conservation des mécanismes utilisés par la nature pour contrôler le destin des cellules, d'un petit ver d'un millimètre de long qui n'est composé que de 959 cellules à l'homme et ses milliards de cellules. Autrement dit il est possible qu'on ait déjà en main la plupart des outils pour reprogrammer ou transdifférencier des cellules.
Je repose donc la question mise en titre : A-t-on vraiment encore besoin du clonage ou des cellules souches embryonnaires humaines quand même un petit ver de terre vient à notre aide ?

mardi 8 mai 2012

Redémarrage en douceur

Suite au vote de la nouvelle loi de bioéthique j'avais peu à peu abandonné ce blog considérant que l'essentiel était fait pour un moment. Mais l'élection de dimanche change la donne. Si l'on en croit les media le mois d'août permettra de faire voter l'autorisation de la recherche sur l'embryon avec d'autres réformes telles que l'autorisation de l'euthanasie. Il faut donc reprendre du service avant qu'il ne soit trop tard.

J'en profite pour poster un billet écrit mais jamais publié. Il est un peu technique et revient sur une annonce faite en novembre 2009 avec conférence de presse et articles dans tous les journaux (français, les autres étaient indifférents) : les cellules souches embryonnaires humaines (CSEH) permettraient de synthétiser de la peau humaine pour traiter les grand brûlés. C'était LA preuve qu'il fallait faire des recherches sur les CSEH et autoriser la recherche sur l'embryon. J'avais déjà montré que toutes les expériences rapportées dans cet article avait été réalisées sur de "vieilles" lignées de CSEH isolées depuis longtemps ; autoriser la recherche sur l'embryon n'aurait donc rien changé.

Je m'intéresse cette fois-ci à l'impact qu'a eu cet article. Il est paru le 21 novembre 2009 dans le Lancet. Plus de deux ans se sont écoulés donc on peut mesurer son facteur d'impact, c'est-à-dire le nombre de fois où il a été cité en deux ans. C'est la mesure couramment utilisée pour mesurer l'importance d'un article. L'outil Web of Knowledge indique 29 citations mais n'en montre que 28 (la 29e n'est pas répertoriée). Sur ces 28 publications 4 sont de 2012 donc ne doivent pas être comptées dans l'impact à deux ans. J'ai laissé les publications de décembre 2011 citant cet article. Reste donc 24 citations en deux ans. Le facteur d'impact du Lancet s'établit à 33,6 (on ne connait pas encore son facteur d'impact pour la période 2010-2011 donc j'ai pris celui de 2009-2010 ; mais il augmente depuis cinq ans dont on peut penser que l'écart sera encore plus grand). Autrement dit cet article a été nettement moins cité que les autres publications du même journal. D'autre part on enlève souvent les auto-citations (celles faites par les mêmes auteurs que celui de l'article cité) pour vraiment mesurer l'importance d'un papier. J'en ai compter 8. Cet article "révolutionnaire" a donc été cité seulement 16 fois par d'autres chercheurs en 2 ans. Pour comparaison l'article de Yamanaka sur les cellules souches induites avait été cité plus de 250 fois deux ans après sa publication. Voilà un article qui a vraiment révolutionné la biologie cellulaire.