samedi 27 avril 2013

L’embryon, un amas de cellules ?


Amas de cellules, boules de cellules : c’est ainsi que certains parlementaires et chercheurs désignent l’embryon. Est-ce vrai ?

Pour répondre à cette question il faut d’abord savoir ce qu’on entend par l’embryon. C’est en effet une petite boule de quelques cellules : les embryons sont en général congelés lorsqu’ils sont composés de quatre à huit cellules mais on peut aussi congeler un zygote (la cellule issue de la fécondation) ou des stades plus tardifs comme le blastocyste. C’est des blastocystes qu’on extrait les cellules qui vont donner naissance aux lignées de cellules souches embryonnaires humaines (CSEH) ; à ce moment là l’embryon est formé entre autre de 70 à 100 cellules pluripotentes qui ont toutes, pour autant qu’on sache, le même potentiel.

Embryon deux cellules, puis quatre cellules, puis au stade morula (les cellules sont désormais attachées les unes aux autres) et enfin au stade blastocyste où on distingue les cellules externes et les cellules internes.


Il semble que cette petite boule de cellules qui grossit lentement peut n’être considéré que comme un amas cellulaire. Au stade quatre cellules on peut séparer ces cellules qui vont chacune être capable de donner naissance à un embryon ; ce sont des cellules totipotentes équivalentes. De même au stade blastocyste les cellules internes, même si elles ne sont plus totipotentes, ont un caractère pluripotent et sont probablement toutes équivalentes. On peut donc considérer que l’embryon, qu’il contienne quelques cellules ou qu’il ait atteint le stade blastocyste, ne soit qu’un amas de cellules interchangeables.

Cependant ce raisonnement ne tient pas compte de deux qualités fondamentales de l’embryon. D’abord celui-ci se développe et il est évident que le stade de développement réclamé par les chercheurs, qui est le stade blastocyste, est différencié ; en effet le blastocyste est formé de deux structures distinctes : une couche externe qui va donner les tissus extra-embryonnaires comme le placenta ou le cordon ombilical, et les cellules internes qui vont donner naissance à un enfant. Les cellules externes ne sont déjà plus capables d’intégrer le corps du fœtus et n’intéressent pas les chercheurs, tandis que les cellules internes sont déjà programmées pour former le fœtus. Ce n’est donc qu’en apparence qu’on peut parler d’amas cellulaire non différencié ; en réalité le développement a bel et bien commencé.

D’autre part il ne fait aucun doute que ce développement est continu et régulier et qu’il a commencé dès la fécondation. Il n'y a aucune rupture dans le développement précoce de l'embryon : on le voit sur la photo ci-dessus où les cellules embryonnaires se divisent peu à peu pour générer un blastocyste. Et les chercheurs, comme tous les autres, s’honoreraient à protéger et défendre le plus petit et le plus faible, plutôt que de vouloir en faire un vulgaire matériau de recherche. Car si l’on autorise la recherche sur les embryons laissés pour compte lors de fécondation in vitro, on pourrait ensuite être tenté de relancer les demandes de clonage, voire d’embryons hybrides homme/animal. On sait comment cela se passe : dès qu’on a mis le pied dans la porte, il n’est plus possible de refermer celle-ci et elle s’ouvre inexorablement. Il faut donc impérativement non pas autoriser la recherche sur l’embryon mais l’interdire en supprimant toutes les dérogations.

lundi 22 avril 2013

RIP François Jacob

 
François Jacob (à gauche sur la photo), compagnon de la Libération et prix Nobel de physiologie-médecine avec Jacques Monod et André Lwoff en 1965 pour la découverte de la régulation de l’expression des gènes, est mort vendredi. Il avait longtemps travaillé à l’Institut Pasteur. Il était un immense chercheur et l’auteur de plusieurs livres dont La logique du vivant et Le jeu des possibles.














Monod et Mère Teresa
Quand je suis devenu biologiste j’ai lu coup sur coup Le hasard et la nécessité de Monod et Le jeu des possibles de Jacob. Des deux livres, le plus puissant est de très loin celui de Monod que l’on sent plus tourmenté et moins sûr de lui que Jacob. C’est Monod qui aurait bien pu être converti par Mère Teresa lors d’un débat à la télévision canadienne. Les deux comptes-rendus trouvés sur internet (ici et ) évoquent un Monod très secoué souhaitant ne surtout pas recroiser Mère Teresa sous peine de voir son athéisme définitivement ébranlé.

Jacob et la fin de la Vérité
Rien de tel dans Le jeu des possibles de Jacob dont l’avant propos révèle une foi inébranlable dans la science et la certitude que la Vérité n’existe pas : « Il y a belle lurette que les scientifiques ont renoncé à l'idée d'une vérité ultime et intangible, image exacte d'une réalité qui attendrait au coin de la rue d'être dévoilée (...) Que la vie et l’homme soient devenus objets de recherche et non plus de révélation, peu l’acceptent (…) Les catastrophes de l’histoire sont moins le fait des scientifiques que des prêtres et des hommes politiques (…) Ce ne sont pas les idées de la science qui engendre les passions. Ce sont les passions qui utilisent la science pour soutenir leur cause (…) Avoir contribué à casser l’idée d’une vérité intangible et éternelle n’est peut-être pas l’un des moindres titres de gloire de la démarche scientifique. » Pas beaucoup de place pour le doute dans tout ça… Mais il faut cependant reconnaître à Jacob une intuition puissante sur le rôle du bricolage dans l'évolution.
Et je retiendrai aussi cet hommage, tiré du premier chapitre : « Mais c’est sans doute la nature du mythe [sic] judéo-chrétien qui a rendu possible la science moderne. Car la science occidentale est fondée sur la doctrine monastique d’un univers ordonné, créé par un Dieu qui reste hors de la nature et la gouverne par des lois accessibles à la raison humaine. »

lundi 15 avril 2013

Des nouvelles de la transdifférenciation

 
La transdifférenciation, aussi appelée conversion directe, consiste à transformer des cellules différenciées en d’autres cellules différenciées sans passer par l’étape cellule souche non différenciée. Cette technique est utilisée ici pour transformer des fibroblastes très ordinaires en oligodendrocytes, des cellules indispensables au bon fonctionnement du système nerveux.
 

Plusieurs maladies aux conséquences dévastatrices (sclérose en plaque, infirmité motrice cérébrale, leucodystrophie congénitale) sont dues à la disparition d’une classe particulière de cellules qu’on appelle « oligodendrocytes » ; ces cellules sont responsables de la formation d’une gaine autour des cellules nerveuses proprement dites, assurant leur survie et leur fonctionnement correct. Il est très difficile d’isoler les précurseurs de ces cellules et la seule alternative consiste à apprendre à la générer en laboratoire. Pour cela on utilisait jusque là des cellules souches embryonnaires, mais le processus de différenciation était trop complexe au dire des auteurs des articles, ou bien on effectuait des prélèvements suite à des avortements thérapeutiques, une solution guère plus pratique car ces tissus sont rares et ces cellules se divisent peu (sans parler bien sûr des considérations éthiques).

Générer facilement des quantités importantes de ces oligodendrocytes, c’est ce que viennent de faire deux équipes dont les résultats sont publiés dans la revue Nature Biotechnology (ici et ), une petite sœur de Nature. Les deux équipes ont chacune de leur coté réussi à mettre au point des protocoles permettant d’obtenir ces cellules à partir de fibroblastes, autres cellules qui sont elles tout à fait ordinaires et que l’on trouve partout dans le corps. Une fois transplantées chez des souris, ces cellules ont été capables d’assurer leur fonction normale de myélinisation des neurones.

Caveat
Les deux articles montrent comment reprogrammer des fibroblastes embryonnaires de souris ou de rats ; inutile de préciser qu’une telle source tissulaire poserait de graves problèmes éthiques chez l’homme. Cependant cela démontre une fois de plus la possibilité de convertir directement des cellules différenciées en d’autres cellules différenciées sans passer par l’étape cellule souche non différenciée. L’avenir de la thérapie cellulaire est sans doute davantage dans ces découvertes que dans les cellules souches embryonnaires humaines ou même les cellules iPS. Et nul doute qu’on saura bientôt les générer en partant de fibroblastes adultes et non plus embryonnaires.

vendredi 12 avril 2013

Essais cliniques : le score est sans appel

La revue Cell Stem Cell a publié en 2012 un article de perspectives de George Daley (Université de Harvard), un des experts mondiaux sur les cellules souches. Sa première figure est reproduite ci-cessous et encore une fois le constat est sans nuance : les essais cliniques utilisant des cellules souches adultes, surtout hématopoïétiques, sont largement en avance sur ceux utilisant des cellules souches embryonnaires. Le score : 1223 à 3 !
 

jeudi 11 avril 2013

Essais cliniques utilisant des cellules souches : la France devant le Royaume-Uni

Les NIH américains répertorient tous les essais cliniques prévus ou en cours. On peut ainsi chercher les essais utilisant des cellules souches, embryonnaires ou non et créer des cartes avec le nombre d'essais par pays. J'ai cherché tous les essais utilisant des cellules souches (en cherchant "stem cells") en Europe. Le résultat est édifiant : en France (237) et en Allemagne (305) où les recherches sur l'embryon ou les cellules souches embryonnaires sont très largement interdites, on compte beaucoup plus d'essai qu'au Royaume-Uni (171) où tout est autorisé. Y a-t-il un lien de cause à effet ?

jeudi 4 avril 2013

Instabilité génétique des cellules souches embryonnaires humaines


Contrairement à ce qu'on entend partout, les cellules iPS ne sont pas plus instables génétiquement que les cellules souches embryonnaires humaines. Et elles ont un avantage majeur !

Un mensonge (non, je ne parle pas du pauvre Cahuzac ; le temps du pardon est venu après ses aveux) tenace pervertit le débat sur les cellules souches embryonnaires humaines (CSEH) : elles seraient parfaites, l'étalon-or de la cellule indifférenciée, la référence absolue, l'outil idéal capable de générer n'importe quel type cellulaire sans aucun problème. Au contraire les cellules iPS seraient bourrées de défauts, remplies d'anomalies et saturées de tares et autres difformités qui les rendraient impropres à la thérapie cellulaire. Aux apôtres de la perfection des CSEH je conseille vivement la lecture d'un brûlot article publié par la revue Nature Reviews Genetics en octobre 2012.

Je cite : "Aucune différence notable n'a été observée dans l'incidence des anomalies chromosomiques entre les CSEH et les cellules iPS : elle est de 12,9% et 12,5% respectivement, sur la base de karyotypes standards dans des méta-analyses de grande ampleur." [No notable differences have been observed in the incidence of chromosomal abnormalities between hESC and hiPSC lines: reported to be 12.9% and 12.5%, respectively, on the basis of standard karyotyping in large-scale meta-analysis].

Voici une petite liste des défauts chromosomiques respectifs des CSEH et des cellules iPS :

Tableau des défauts chromosomiques trouvés dans les CSEH et les cellules iPS. Comme on peut le constater les cellules iPS n'ont rien à envier aux CSEH : on y trouve plutôt moins d'amplifications chromosomiques.

Pour ceux qui auraient encore des doutes je conseille la lecture de deux articles parus en 2012, l'un dans Nature et l'autre dans Cell Stem Cell. Le premier démontre que la plupart des défauts chromosomiques observés dans les cellules iPS sont déjà présents dans les cellules d'origine, ce qui implique que le processus de reprogrammation n'est pas fautif. Le second article propose une nouvelle méthode de reprogrammation qui induit beaucoup moins de défauts chromosomiques que les précédentes.

Maintenant que cette question est réglée, il suffit de rappeler que les cellules iPS ont l'immense avantage de ne pas induire de réponse immunitaire, contrairement aux CSEH, puisqu'elles permettront de réaliser des greffes autologues.

lundi 1 avril 2013

Le Pr Pasdips réclame l’annulation du prix Nobel du Pr Yamanaka


Le célèbre Pr Pasdips du CIRC (Centre International de Recherche sur les Cellules souches embryonnaires) demande l’annulation du prix Nobel du Pr Yamanaka pour sa scandaleuse découverte des cellules iPS ; son travail empêche en effet une recherche sereine et paisible consistant à détruire des embryons pour leur donner un avenir digne d'eux sous la forme de lignées de cellules souches embryonnaires humaines (CSEH). Il rappelle qu’en aucun cas les cellules iPS ne pourront remplacer les CSEH. De plus il accuse le Pr Yamanaka d’avoir prétendu que les CSEH étaient seulement pluripotentes alors qu’elles sont totipotentes. Enfin il rappelle que le Pr Yamanaka a grotesquement prétendu voir l’image de ses filles dans un embryon humain. "Ces déclarations scandaleuses doivent cesser", martèle le Pr Pasdips, "et on doit absolument lui retirer son prix Nobel".
Il réclame dans la foulé la démission du Pr Peschanki de l'I-STEM pour avoir écrit récemment : "Les cellules souches embryonnaires humaines sont sujettes à des instabilités chromosomiques, ce qui pourrait limiter leur utilité clinique", autre déclaration diffamatoire à l'égard des CSEH, alors que seules les cellules iPS présentent des défauts.
Enfin un courageux défenseur des CSEH que les députés feraient bien d'inviter à l'AN pour leur fournir des arguments sérieux !