Du fondamental et de l'évolution, pour changer. Deux observations vont transformer la façon dont on imagine le transfert de l'information génétique. On considère que le matériel génétique, à savoir l'ADN, se transmet essentiellement de façon verticale d'une génération à l'autre par la voie de la reproduction. Cela est vrai chez les bactéries (cellules sans noyau), les Archés (des microorganismes particuliers) et les Eucaryotes (les cellules à noyau). Une exception à cette règle : chez les bactéries le transfert peut se faire de façon horizontale entre deux bactéries sans que cela implique un événement reproducteur. On pensait que c'était vrai seulement chez les bactéries.
Mais deux articles publiés aujourd'hui suggèrent le contraire. Le premier est publié dans Nature et démontre le transfert d'ADN entre des parasites invertébrés, les punaises de l'espèce Rhodnius prolixus et plusieurs hôtes vertébrés, d'un escargot aquatique (la petite Limnée Lymnaea stagnalis) à des singes capucins en passant par les opossums. Le matériel génétique transmis est du type transposon et l'importance du transfert pourrait suffire à influencer l'évolution des espèces parasitées.
Le deuxième article, publié dans Science, est encore plus spectaculaire. Certains pucerons peuvent synthétiser des caroténoïdes qui sont de puissants antioxydants. Jusque là on pensait que seuls les végétaux en produisait et qu'un animal ne pouvait en obtenir qu'en se nourrissant de plantes. Pourtant des pucerons (le pucerons vert du pois, Acyrthosiphon pisum) ont acquis la capacité de synthétiser ces molécules par eux-mêmes. Mais le plus spectaculaire est ailleurs : le gène qui leur donne cette capacité vient directement... d'une moisissure. Pour la première fois on a donc observé le transfert horizontal d'un gène entre deux règnes du monde vivant, celui des moisissures et autres champignons, et celui des animaux. Et la présence ou non de ce gène donne leur couleur aux pucerons : sans lui ils sont verts, avec lui ils sont rouges, et avec une seule copie ils sont jaune-orange. Mendel n'aurait pas rêvé génétique plus simple !
Ces deux découvertes, la deuxième surtout, vient renverser une hypothèse solidement établie - celle du transfert uniquement vertical de l'information génétique - et forcera chacun à repenser les mécanismes de transmission du matériel génétique entre des organismes qui n'ont a priori rien de commun. D'autre part il sera bien difficile d'expliquer ces observations en terme de créationnisme ou d'ID ("intelligent design").
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2 commentaires:
Votre deuxième point surtout annonce en effet une découverte de premier ordre dont l'importance est visible même pour un profane.
Elle suggère qu'il n'avait pas tort ce vieux médecin qui disait : " En biologie quand c'est simple, c'est à peu près sûrement faux ! "
Mais, si cette piste horizontale laisse des traces qui suggérent une certaine fréquence d'événements, la complexité de vos analyses ne risque-elle pas de devenir presque impossible à maîtriser ?
Enfin, la chose paraissant vraiment "formidable" au profane, pourquoi vous n'avez-vous mis que 2 étoiles à votre note et pas 3 ? Est-elle moins inattendu ou moins extra - ordinaire qu'il ne semble ?
Certes savoir que des gènes peuvent ainsi passer d'un organisme à l'autre ne va pas simplifier nos analyses. Mais le séquençage du génome d'un nombre toujours plus grand d'espèces permettra de résoudre ce nouveau problème.
Deux étoiles et non trois : les trois étoiles sont réservées de façon tout à fait arbitraire à ce qui a une portée éthique en plus d'avoir une portée scientifique exceptionnelle. Mais il est vrai que du strict point de vue scientifique, les trois étoiles sont méritées.
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