jeudi 21 mars 2013

Un pape pour notre époque

 Éditorial de Nature, le 19 mars 2013. Si tout n'est pas parfait (j'ai omis certains passages, notamment une critique de l'opposition de l'Église à la promotion du préservatif) une telle ouverture et un tel hommage au travail de l'Église de la part de Nature est une excellente surprise.

"Que vous soyez croyant ou non, il est difficile de ne pas aimer cet homme. Quelques jours après l’apparition de la fumée blanche au-dessus du toit de la chapelle Sixtine au Vatican, le monde en a appris un peu plus sur Jorge Mario Bergoglio élu pape sous François Ier. Le premier pape d'Amérique latine, archevêque de Buenos Aires (…) renonça à une grande maison pour un petit appartement, préféra prendre le bus que d'utiliser un chauffeur, et se consacra à un travail pastoral dans les bidonvilles. L'affable pape François a déjà séduit le public avec son humilité désarmante, son flair évident pour les improvisations et son humour. Il est clair que la papauté de François marque une rupture avec le passé, un style nouveau et rafraîchissant, et une ambition de mettre l'accent sur la justice sociale. «Que je voudrais une Eglise pauvre et pour les pauvres!".
Nous avons également appris que l'homme a obtenu son premier diplôme en chimie, puis d’autres en philosophie et en théologie, et qu'il a enseigné la littérature et la psychologie à l'université. Cette éducation très diversifiée et cette humilité ne sont pas vraiment une surprise car Bergoglio est le premier pape jésuite. Les jésuites, le plus grand ordre dans l'Eglise catholique, sont son élite intellectuelle et sont connus pour leur indépendance d'esprit. (…) Ils ont longtemps travaillé en tant que missionnaires, et sont connus pour la création et la gestion de certaines des meilleures écoles et universités du monde. De nombreux jésuites sont également des scientifiques.
Nous savons peu de choses des opinions de Bergoglio sur les questions scientifiques (…). Les très nombreux scientifiques parmi les 1,2 milliards de baptisés catholiques aimerait en savoir plus. (…) Mais ce qui est clair, c'est que, contrairement à une idée reçue, l'Eglise catholique moderne est une amie de la science et le pape François continuera sans aucun doute, et peut-être approfondira, cette tradition. Le fort soutien de l'Eglise pour l'évolution darwinienne, par exemple, contraste fortement avec une croyance au créationisme anti-scientifique de nombreux évangélistes et législateurs américains - un concept que le pape Benoît XVI a considéré à juste titre en 2007 comme «absurde». Les prêtres nous ont aussi donné la génétique mendélienne [le père abbé Gregor Mendel] et ont contribué à la théorie du Big Bang [l’abbé Georges Lemaître].
En outre, les papes récents ont considérablement accru leurs efforts pour engager un dialogue avec les scientifiques sur de nombreuses questions, depuis la recherche sur les cellules souches embryonnaires et les cultures génétiquement modifiées jusqu’à la fécondation in vitro, l'avortement et l'euthanasie - et ce dialogue sera encore plus important à l'avenir avec l'avancement des neurosciences et de la génétique, y compris le dépistage prénatal. Les scientifiques qui ont pris part à ces discussions parlent de débats constructifs qui suscitent la réflexion, et d’une Eglise ouverte aux idées et dont l’enseignement change souvent suite à ces débats. (…)
Si ses enseignements peuvent être modifiés, l'Eglise ne fera aucun compromis sur ses dogmes centraux, tels que le caractère sacré de la vie humaine et le fait que la vie commence dès la conception. Cependant la science et la foi peuvent apporter des visions du monde complémentaires, et les progrès scientifiques peuvent questionner la justification des enseignements ecclésiastiques ; réciproquement la foi peut souvent apporter les dimensions indispensables de l'éthique et de la justice sociale face aux progrès de la science et à leur impact sur la société. Les affrontements sont inévitables entre des gens de croyances différentes, mais la science comme la religion bénéficieront de la construction de ponts pour surmonter les divisions. Comment le Pape François répondra aux questions où science et religion se rencontrent sera un critère important."


Les textes entre crochets sont des ajouts personnels.

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