La société Geron a annoncé qu'elle venait d'arriver à un accord avec la FDA pour reprendre son essai clinique afin de tester l'effet de cellules souches embryonnaires humaines sur la réparation de la moelle épinière. Celui-ci a été arrêté par la FDA après l'apparition de kystes chez les souris traitées.
Cet essai pourrait reprendre à l'automne 2010, comme l'indique le communiqué de presse de Geron :
"In discussions with the company, the FDA has advised that it concurs with Geron that positive data from this study can be used to support both release of the clinical hold and expansion to cervical patients. Geron expects the data from this study to enable re-initiation of the clinical trial in the third quarter of 2010."
samedi 31 octobre 2009
jeudi 29 octobre 2009
Légalité et financement de la recherche
Que faut-il pour réaliser un projet scientifique ?
La première condition est la suivante : est-ce légal ? Tant qu'il s'agit d'animaux, les obstacles légaux sont limités. Tout au plus vous demandera-t-on de remplir une telle montagne de papier que vous renoncerez à faire la manip. Comme par exemple implanter des électrodes dans le cerveau d'un animal. Quand il s'agit de l'homme, le cadre légal est bien sûr beaucoup plus contraignant. Par exemple aujourd'hui la recherche sur l'embryon ne peut se faire qu'après autorisation express ; et il est interdit d'en créer uniquement à des fins de recherche, ou de fabriquer des embryons hybrides humain-animal.
La deuxième question concerne les financements : ce projet sera-t-il sélectionné par une agence de financement comme l'ANR ou une association telle que l'ARC, la Ligue contre le cancer ou la Fondation pour la recherche médicale ? Et là, c'est beaucoup plus compliqué car les projets sont systématiquement évalués par d'autres chercheurs, entre un et trois selon l'importance du projet et la somme demandée. Quasiment plus aucune recherche ne se fait en France sur financement "automatique". Ce que donnent le CNRS ou l'INSERM à une équipe de recherche pour l'année permet tout juste de tenir entre deux et huit semaines (ça dépend de la taille de l'équipe et du type de recherche), le reste vient de financements obtenus sur projets évalués par des pairs. Reste la complication des appels à projets sur des thématiques prédéfinies par l'état : dans ce cas là les évaluateurs ne sont plus totalement libres car il faut coller à une thématique ce qui peut impliquer le rejet d'un excellent projet qui n'aurait qu'un rapport lointain avec l'objet de l'appel d'offre.
Le problème du financement explique pourquoi certaines recherches autorisées ne sont jamais mises en pratique. On a vu l'exemple de la Grande-Bretagne légalisant les embryons hybrides après une montée au créneau des chercheurs, suivi par le refus de financer les projets déposés par les trois équipes autorisés à faire ce type d'expériences. Il serait donc inutile d'autoriser, de façon exceptionnelle ou courante, des recherches qui ne seraient pas financées ensuite.
Le problème est qu'avec l'utilitarisme ambiant, un chercheur voudra pouvoir faire une manip pour le cas où. Donc il dira presque toujours qu'un type d'expérience donné devrait être autorisé. Sur cette base, je dirais qu'il faut autoriser la recherche sur les cellules souches embryonnaires car on ne sait jamais. Mais le débat dépasse largement les enjeux purement scientifiques quand il s'agit de la vie d'embryons humains. C'est pourquoi il est juste d'adopter la démarche française de légaliser ou non à priori et d'expliquer pourquoi on prend telle ou telle position, plutôt que la méthode anglo-saxonne qui est de presque tout autoriser (Grande-Bretagne) ou de ne poser des limites que pour l'argent fédéral (États-Unis) et ensuite de se poser la question de savoir si ça va servir à quelque chose.
dimanche 25 octobre 2009
Reprogrammation de cellules de sang de cordon ombilical
Deux études publiées récemment par la revue Cell Stem Cell rapportent la reprogrammation de cellules du sang de cordon ombilical (Haase, A. et al. Generation of induced pluripotent stem cells from human cord blood. Cell Stem Cell 5, 434–441. Giorgetti, A. et al. Generation of induced pluripotent stem cells from human cord blood using OCT4 and SOX2. Cell Stem Cell 5, 353–357 ; ces deux articles sont en libre accès). Dans la première étude, quatre facteurs ont été utilisés, OCT4, SOX2, NANOG et LIN28. Dans la deuxième, les chercheurs ont obtenus des cellules iPS en utilisant seulement OCT4 et SOX2, avec la même efficacité que dans la première. Ces deux facteurs lorsqu'ils sont utilisés seuls ne permettent pas de reprogrammer des kératinocytes ou des fibroblastes, ce qui démontre que ces cellules sont plus faciles à reprogrammer que des cellules adultes. Ceci est logique car les cellules du sang de cordon sont par définition plus jeunes (elles n'ont que neuf mois) que des cellules différenciées.
L'avantage des cellules du sang de cordon
La revue Nature Reviews Molecular Cell Biology fait une courte recension de ces deux articles, insistant sur les avantages que présentent ces cellules : elles sont facilement disponibles, facilement conservées par congélation, et jeunes. Dans l'une des études, des cellules iPS ont pu être obtenues avec des cellules congelées depuis cinq ans. C'est un élément important dans le débat sur la création de banques de sang de cordon, qu'elles soient publiques ou privées. Une personne dont le sang de cordon aura été conservé pourrait un jour se voir greffer ses propres cellules après reprogrammation en cellules iPS et différenciation dans un autre type cellulaire, évitant tout problème de rejet immunitaire. Conclusion de la revue : « These two studies open the possibility that cord blood banks, accessible worldwide, could become an almost unlimited source of clinically useful stem cells. » [Ces deux études ouvrent la possibilité que les banques de sang de cordon, accessible partout dans le monde, deviennent une source quasiment illimitée de cellules souches utilisables pour des thérapies].
PS : voici ce que j'écrivais le 6 février dernier (ça fait du bien de savoir qu'on peut avoir raison) :
À quand la reprogrammation des cellules de sang de cordon ombilical ?
De jour en jour, la technique de reprogrammation s'améliore, et j'attends avec impatience l'annonce de l'utilisation de cette méthode sur des cellules de sang de cordon ombilical. Elles seront sans doute plus facile à reprogrammer car déjà multipotentes. Au vu des résultats publiés récemment on peut s'attendre à une reprogrammation avec peu de facteurs et sans retrovirus [les études citées ici ont été réalisées avec des retrovirus donc ce n'est pas encore fait...], le tout sur des cellules faciles à obtenir.
L'avantage des cellules du sang de cordon
La revue Nature Reviews Molecular Cell Biology fait une courte recension de ces deux articles, insistant sur les avantages que présentent ces cellules : elles sont facilement disponibles, facilement conservées par congélation, et jeunes. Dans l'une des études, des cellules iPS ont pu être obtenues avec des cellules congelées depuis cinq ans. C'est un élément important dans le débat sur la création de banques de sang de cordon, qu'elles soient publiques ou privées. Une personne dont le sang de cordon aura été conservé pourrait un jour se voir greffer ses propres cellules après reprogrammation en cellules iPS et différenciation dans un autre type cellulaire, évitant tout problème de rejet immunitaire. Conclusion de la revue : « These two studies open the possibility that cord blood banks, accessible worldwide, could become an almost unlimited source of clinically useful stem cells. » [Ces deux études ouvrent la possibilité que les banques de sang de cordon, accessible partout dans le monde, deviennent une source quasiment illimitée de cellules souches utilisables pour des thérapies].
PS : voici ce que j'écrivais le 6 février dernier (ça fait du bien de savoir qu'on peut avoir raison) :
À quand la reprogrammation des cellules de sang de cordon ombilical ?
De jour en jour, la technique de reprogrammation s'améliore, et j'attends avec impatience l'annonce de l'utilisation de cette méthode sur des cellules de sang de cordon ombilical. Elles seront sans doute plus facile à reprogrammer car déjà multipotentes. Au vu des résultats publiés récemment on peut s'attendre à une reprogrammation avec peu de facteurs et sans retrovirus [les études citées ici ont été réalisées avec des retrovirus donc ce n'est pas encore fait...], le tout sur des cellules faciles à obtenir.
samedi 24 octobre 2009
Adult somatic stem cells : new perspectives ; un congrès à la forme originale
Le congrès "Adult somatic stem cells : new perspectives" se tiendra à Monaco fin novembre. C'est le deuxième congrès d'une série intitulée International Congress on Responsible Stem Cell Research. Lors de la première édition en 2006, l'invité vedette n'était autre que Shinya Yamanaka, le découvreur de la reprogrammation de cellules différenciées en cellules iPS (induced puripotent stem cells). Cette année, l'invité vedette s'appelle Eliane Gluckman, spécialiste mondiale de la greffe de cellules de sang de cordon avec une première mondiale en 1988.
La forme originale du congrès
Il s'agit bien d'un congrès scientifique, avec séminaires et posters, présentations en anglais, etc. Mais il est organisé conjointement par plusieurs organisations, telles que l'Académie Pontificale pour la Vie (APV), la Fondation Lejeune, La Fédération Internationale des Associations Médicales Catholiques et Le Comité Consultatif Bioéthique de Monaco. Le congrès sera ouvert par une allocution de Mgr Fisichella, président de l'APV, et se terminera par une session dédiée à la bioéthique avec notamment Mgr Suaudeau (de l'APV), Marie-Thérèse Hermange (sénateur de Paris) et Jean-Marie Le Méné (président de la Fondation Lejeune). La forme originale de ce congrès est donc d'aborder simultanément les aspects scientifiques et éthiques des questions soulevées et des réponses apportées par la recherche sur les cellules souches adultes.
Quand le Vatican dégaine plus vite que son ombre
Une anecdote : le premier congrès avait eu lieu fin 2006. L'article de Takahashi et Yamanaka était sorti le 25 août de la même année dans la revue Cell. À tous ceux qui considèrent que le Vatican a toujours une guerre de retard, je conseille de méditer cette réaction extrêmement rapide : ils ne s'étaient pas trompés en identifiant la découverte de Yamanaka comme révolutionnaire.
La forme originale du congrès
Il s'agit bien d'un congrès scientifique, avec séminaires et posters, présentations en anglais, etc. Mais il est organisé conjointement par plusieurs organisations, telles que l'Académie Pontificale pour la Vie (APV), la Fondation Lejeune, La Fédération Internationale des Associations Médicales Catholiques et Le Comité Consultatif Bioéthique de Monaco. Le congrès sera ouvert par une allocution de Mgr Fisichella, président de l'APV, et se terminera par une session dédiée à la bioéthique avec notamment Mgr Suaudeau (de l'APV), Marie-Thérèse Hermange (sénateur de Paris) et Jean-Marie Le Méné (président de la Fondation Lejeune). La forme originale de ce congrès est donc d'aborder simultanément les aspects scientifiques et éthiques des questions soulevées et des réponses apportées par la recherche sur les cellules souches adultes.
Quand le Vatican dégaine plus vite que son ombre
Une anecdote : le premier congrès avait eu lieu fin 2006. L'article de Takahashi et Yamanaka était sorti le 25 août de la même année dans la revue Cell. À tous ceux qui considèrent que le Vatican a toujours une guerre de retard, je conseille de méditer cette réaction extrêmement rapide : ils ne s'étaient pas trompés en identifiant la découverte de Yamanaka comme révolutionnaire.
mardi 20 octobre 2009
Le néo-colonialisme de la reproduction
Pour la fécondation in vitro, on a besoin d'oocytes, ces cellules sexuelles de la femme qu'il n'est pas aisé de recueillir. Ce problème devient complexe lorsque la femme n'en a plus ou qu'elle est stérile. Il y a plusieurs solutions. La première consiste à demander à une femme qui vient pour une fécondation in vitro de donner quelques oocytes supplémentaires. La deuxième solution à laquelle on vient doucement est de rétribuer le don d'oocytes ; c'est ce que fait l'état de New-York depuis le mois de juin 2009 (voir à ce sujet l'article du Washington Post). Enfin la dernière solution consiste à partir acheter des oocytes, et la fertilisation in vitro, à l'étranger.
Des oocytes achetés en Europe de l'est : une forme de prostitution ?
Naomi Pfeffer, auteur de plusieurs livres et articles sur des développements médicaux controversés, a récemment présenté son analyse de la situation devant la “Motherhood in the 21st Century Conference” à la University College London. Elle a eu des mots très durs : “The exchange relationship is analogous to that of a client and a prostitute. It’s a unique situation because it’s the only instance in which a woman exploits another woman’s body.” [La relation d'échange est analogue à celle d'un client et d'une prostituée. C'est une situation unique car c'est le seul exemple où une femme exploite le corps d'une autre femme]. Lord Winston, expert en fertilité, approuve les propos de Pfeffer : “She’s right, basically. It’s a form of exploitation.” [Elle a raison, au fond. C'est une forme d'exploitation]. Un récent rapport cité par un article du quotidien britannique The Times évoque le chiffre de 20 à 25.000 traitements pour la fertilité réalisés à l'étranger, notamment en Espagne, en République tchèque, en Roumanie et en Ukraine. Pour un coût de quelques centaines d'euros au lieu des 5 à 6.000 euros nécessaires en Grande-Bretagne dans le privé.
Il faut savoir que la production de ces oocytes nécessite un traitement hormonal lourd, et que l'extraction elle-même des oocytes est assez douloureuse. De plus il existe un risque rare mais non négligeable de stimulation trop importante ayant de graves conséquences.
Le problème pourrait se poser tôt ou tard aussi pour la recherche sur l'embryon et l'obtention de cellules souches embryonnaires humaines. La seule autre solution disponible sera de payer les femmes comme dans l'état de New-York ou comme cela commence à être demandé en Grande-Bretagne. La solution consistant à se passer des oocytes d'une femme pour les remplacer par ceux d'une autre espèce, lapin, vache, souris etc (embryons hybrides) vient d'être abandonnée en Grande-Bretagne (voir ici).
Naomi Pfeffer, auteur de plusieurs livres et articles sur des développements médicaux controversés, a récemment présenté son analyse de la situation devant la “Motherhood in the 21st Century Conference” à la University College London. Elle a eu des mots très durs : “The exchange relationship is analogous to that of a client and a prostitute. It’s a unique situation because it’s the only instance in which a woman exploits another woman’s body.” [La relation d'échange est analogue à celle d'un client et d'une prostituée. C'est une situation unique car c'est le seul exemple où une femme exploite le corps d'une autre femme]. Lord Winston, expert en fertilité, approuve les propos de Pfeffer : “She’s right, basically. It’s a form of exploitation.” [Elle a raison, au fond. C'est une forme d'exploitation]. Un récent rapport cité par un article du quotidien britannique The Times évoque le chiffre de 20 à 25.000 traitements pour la fertilité réalisés à l'étranger, notamment en Espagne, en République tchèque, en Roumanie et en Ukraine. Pour un coût de quelques centaines d'euros au lieu des 5 à 6.000 euros nécessaires en Grande-Bretagne dans le privé.
Il faut savoir que la production de ces oocytes nécessite un traitement hormonal lourd, et que l'extraction elle-même des oocytes est assez douloureuse. De plus il existe un risque rare mais non négligeable de stimulation trop importante ayant de graves conséquences.
Le problème pourrait se poser tôt ou tard aussi pour la recherche sur l'embryon et l'obtention de cellules souches embryonnaires humaines. La seule autre solution disponible sera de payer les femmes comme dans l'état de New-York ou comme cela commence à être demandé en Grande-Bretagne. La solution consistant à se passer des oocytes d'une femme pour les remplacer par ceux d'une autre espèce, lapin, vache, souris etc (embryons hybrides) vient d'être abandonnée en Grande-Bretagne (voir ici).
Les mères porteuses indiennes
Lorsqu'un enfant est conçu avec du sperme qui vient d'Israël et un oocyte provenant des États-Unis (car les clients veulent des enfants blancs) où a lieu la fertilisation, et que l'embryon est envoyé en Inde pour être implanté chez une mère porteuse indienne qui subira une césarienne pour que l'enfant soit remis au couple (qui n'est pas forcément constitué d'un homme et d'une femme) qui a payé le tout, on peut légitimement se demander qui sont les parents de l'enfant. C'est pourtant la situation décrite dans un documentaire israélien réalisé par l'israélienne Zippi Brand Frank. Ce film, intitulé Google Baby et présenté au Festival International de Toronto, raconte le marché de la reproduction devenu mondialisé. Ici, le sperme vient du père, l'oocyte d'une américaine étant payée plusieurs milliers de dollars, et la mère porteuse obtient, en échange de cette grossesse, l'équivalent de plusieurs années de salaire.
Une nouvelle forme de colonialisme
On ne peut pas s'empêcher de penser que cela représente une forme particulièrement basse de néo-colonialisme, les femmes pauvres devenant des usines à produire des oocytes et à porter des enfants pour les riches blancs trouvant normal d'étendre le principe de l'économie de marché jusqu'à contrôler le ventre des femmes. Le tout assorti d'injonctions péremptoires sur la nécessaire baisse du taux de fécondité dans ces pays, la planète ne pouvant supporter tous ces pauvres aspirant à mener notre train de vie...
Lorsqu'un enfant est conçu avec du sperme qui vient d'Israël et un oocyte provenant des États-Unis (car les clients veulent des enfants blancs) où a lieu la fertilisation, et que l'embryon est envoyé en Inde pour être implanté chez une mère porteuse indienne qui subira une césarienne pour que l'enfant soit remis au couple (qui n'est pas forcément constitué d'un homme et d'une femme) qui a payé le tout, on peut légitimement se demander qui sont les parents de l'enfant. C'est pourtant la situation décrite dans un documentaire israélien réalisé par l'israélienne Zippi Brand Frank. Ce film, intitulé Google Baby et présenté au Festival International de Toronto, raconte le marché de la reproduction devenu mondialisé. Ici, le sperme vient du père, l'oocyte d'une américaine étant payée plusieurs milliers de dollars, et la mère porteuse obtient, en échange de cette grossesse, l'équivalent de plusieurs années de salaire.
Une nouvelle forme de colonialisme
On ne peut pas s'empêcher de penser que cela représente une forme particulièrement basse de néo-colonialisme, les femmes pauvres devenant des usines à produire des oocytes et à porter des enfants pour les riches blancs trouvant normal d'étendre le principe de l'économie de marché jusqu'à contrôler le ventre des femmes. Le tout assorti d'injonctions péremptoires sur la nécessaire baisse du taux de fécondité dans ces pays, la planète ne pouvant supporter tous ces pauvres aspirant à mener notre train de vie...
samedi 17 octobre 2009
Maladie de Parkinson II : retour de la thérapie cellulaire ?
Âmes sensibles, s'abstenir...
Sous le titre "Fetal cells again", la revue Science publie un commentaire sur une nouvelle tentative de thérapie cellulaire en injectant des neurones prélevés sur des fœtus de 6 à 9 semaines. Pourtant on croyait cette solution dépassée. Ce commentaire rappelle comment dans les années 90 il a été montré que les effets bénéfiques d'une telle solution étaient très mineurs et qu'elle induisait des effets secondaires telles que des mouvements incontrôlés ou dyskinésie. De plus, les cellules introduites sont également atteintes peu à peu par la maladie de Parkinson. Le magazine Newsweek faisait le même constat il y a tout juste un an (voir mon billet de l'année dernière ici). Et le doute s'installe de plus en plus comme le dit Constance Holden dans Science.
Pourtant, des chercheurs européens et américains sont en négociation à l'heure actuelle avec l'Union européenne pour obtenir un très important financement afin de relancer ces essais de thérapie cellulaire. Certains parmi ceux qui ont conduit les essais des années 90 sont très sceptiques, comme C. Warren Olanow, un neurologue de la Mount Sinai School of Medicine de New York : "I think it's a step backwards; ... all the double-blind trials have failed," [Je pense que c'est un retour en arrière ; ... tous les essais en double aveugle ont échoué].
La principale difficulté réside dans l'état de différenciation des neurones injectés : s'ils ne sont pas assez différenciés, on risque d'induire la formation de tumeurs, et s'ils le sont trop ils ne serviront à rien. C'est là qu'intervient l'âge des fœtus utilisés : 6 à 9 semaines serait l'âge idéal et il en faudrait entre quatre et six pour traiter un patient... Les premiers essais pourraient avoir lieu en 2012 si l'Union européenne accorde les financements. Pourtant d'autres voix se font entendre : Ted Dawson, spécialistes des maladie neurodégénératives à la Johns Hopkins University de Baltimore pense que cela est "surprising. ... I had thought there was going to be a moratorium [on fetal tissue transplants] until we had a better understanding of dopamine neurons in transplantation." [C'est surprenant (...) Je pensais qu'il y aurait un moratorium sur les transplantations de tissus fœtaux jusqu'à ce qu'on comprenne mieux comment transplanter des neurones dopaminergiques.]
Une erreur sur la compréhension de la maladie de Parkinson ?
Dans les années 90, la maladie de Parkinson était attribuée à la mort de neurones dopaminergiques et les traitements envisagées étaient soit l'injection de neurones dopaminergiques, soit l'utilisation de la L-DOPA, une substance qui permet de mimer la présence de ces neurones. Mais la recherche a beaucoup progressé depuis et la maladie s'avère plus complexe. En particulier, Olanow est tout aussi sceptique en ce qui concerne l'essai de thérapie génique évoqué dans le billet précédent et consistant à introduire les enzymes permettant de fabriquer la dopamine.
La fondation Michael J Fox ne soutient plus ce type de thérapie
Mais le plus surprenant est le changement d'attitude de la fondation de Michael J Fox. Certains se souviennent sans doute que cet acteur, atteint de façon précoce par la maladie de Parkinson (il est né en 1961), a été un ardent avocat de la thérapie cellulaire et de la recherche sur les cellules souches embryonnaires. Pourtant aujourd'hui il semble que sa fondation, la MJFF (Michael J Fox Fundation) soit tournée vers des thérapies entièrement différentes. Sa directrice Katie Hood l'avoue : "I was totally naïve when I came to the foundation (in 2002). ... All my exposure was pop media; I thought it was all about stem cells. ... I have not totally lost hope on cell replacement, [but] I just don't think it's a near-term hope." [J'étais totalement naïve quand je suis arrivée à la fondation en (2002) (...) Je pensais qu'il n'y avait que les cellules souches (...) Je n'ai pas perdu tout espoir de thérapie cellulaire mais je ne pense plus que ce soit pour un futur proche]. De fait dans le rapport 2008 de la Fondation, il est essentiellement question de thérapies à base de nouvelles molécules plutôt que de thérapie cellulaire.
Sous le titre "Fetal cells again", la revue Science publie un commentaire sur une nouvelle tentative de thérapie cellulaire en injectant des neurones prélevés sur des fœtus de 6 à 9 semaines. Pourtant on croyait cette solution dépassée. Ce commentaire rappelle comment dans les années 90 il a été montré que les effets bénéfiques d'une telle solution étaient très mineurs et qu'elle induisait des effets secondaires telles que des mouvements incontrôlés ou dyskinésie. De plus, les cellules introduites sont également atteintes peu à peu par la maladie de Parkinson. Le magazine Newsweek faisait le même constat il y a tout juste un an (voir mon billet de l'année dernière ici). Et le doute s'installe de plus en plus comme le dit Constance Holden dans Science.
Pourtant, des chercheurs européens et américains sont en négociation à l'heure actuelle avec l'Union européenne pour obtenir un très important financement afin de relancer ces essais de thérapie cellulaire. Certains parmi ceux qui ont conduit les essais des années 90 sont très sceptiques, comme C. Warren Olanow, un neurologue de la Mount Sinai School of Medicine de New York : "I think it's a step backwards; ... all the double-blind trials have failed," [Je pense que c'est un retour en arrière ; ... tous les essais en double aveugle ont échoué].
La principale difficulté réside dans l'état de différenciation des neurones injectés : s'ils ne sont pas assez différenciés, on risque d'induire la formation de tumeurs, et s'ils le sont trop ils ne serviront à rien. C'est là qu'intervient l'âge des fœtus utilisés : 6 à 9 semaines serait l'âge idéal et il en faudrait entre quatre et six pour traiter un patient... Les premiers essais pourraient avoir lieu en 2012 si l'Union européenne accorde les financements. Pourtant d'autres voix se font entendre : Ted Dawson, spécialistes des maladie neurodégénératives à la Johns Hopkins University de Baltimore pense que cela est "surprising. ... I had thought there was going to be a moratorium [on fetal tissue transplants] until we had a better understanding of dopamine neurons in transplantation." [C'est surprenant (...) Je pensais qu'il y aurait un moratorium sur les transplantations de tissus fœtaux jusqu'à ce qu'on comprenne mieux comment transplanter des neurones dopaminergiques.]
Une erreur sur la compréhension de la maladie de Parkinson ?
Dans les années 90, la maladie de Parkinson était attribuée à la mort de neurones dopaminergiques et les traitements envisagées étaient soit l'injection de neurones dopaminergiques, soit l'utilisation de la L-DOPA, une substance qui permet de mimer la présence de ces neurones. Mais la recherche a beaucoup progressé depuis et la maladie s'avère plus complexe. En particulier, Olanow est tout aussi sceptique en ce qui concerne l'essai de thérapie génique évoqué dans le billet précédent et consistant à introduire les enzymes permettant de fabriquer la dopamine.
La fondation Michael J Fox ne soutient plus ce type de thérapie
Mais le plus surprenant est le changement d'attitude de la fondation de Michael J Fox. Certains se souviennent sans doute que cet acteur, atteint de façon précoce par la maladie de Parkinson (il est né en 1961), a été un ardent avocat de la thérapie cellulaire et de la recherche sur les cellules souches embryonnaires. Pourtant aujourd'hui il semble que sa fondation, la MJFF (Michael J Fox Fundation) soit tournée vers des thérapies entièrement différentes. Sa directrice Katie Hood l'avoue : "I was totally naïve when I came to the foundation (in 2002). ... All my exposure was pop media; I thought it was all about stem cells. ... I have not totally lost hope on cell replacement, [but] I just don't think it's a near-term hope." [J'étais totalement naïve quand je suis arrivée à la fondation en (2002) (...) Je pensais qu'il n'y avait que les cellules souches (...) Je n'ai pas perdu tout espoir de thérapie cellulaire mais je ne pense plus que ce soit pour un futur proche]. De fait dans le rapport 2008 de la Fondation, il est essentiellement question de thérapies à base de nouvelles molécules plutôt que de thérapie cellulaire.
vendredi 16 octobre 2009
Maladie de Parkinson I : une thérapie génique prometteuse
Une équipe française a des résultats prometteurs après une nouvelle approche de thérapie génique sur des singes pour traiter la maladie de Parkinson. Voir ici l'article du Monde sur le sujet. Des essais cliniques chez l'homme viennent de commencer.
La fin des hybrides
En 2008, trois équipes britanniques avaient reçu l'autorisation de faire des recherches impliquant la création d'hybrides entre l'homme et les animaux. Le but était de parvenir à isoler des lignées de cellules souches à partir de ces embryons hybrides. En début d'année, le quotidien britannique The Independent s'était ému de ce que deux des trois équipes s'étaient vu refusé une demande de financement (j'en ai parlé ici). The Independent, toujours lui, nous annonce maintenant que la troisième équipe jette l'éponge : pas de financement et non-renouvellement de l'autorisation initiale (voir aussi la dépêche de Gènéthique). Pourtant le journal rappelle qu'en 2008 les patrons des agences de financement et la plupart des scientifiques avaient demandé à ce que ce type de recherches puisse être mené en Grande-Bretagne. Le patron de cette dernière équipe part pour l'Australie, alors que ceux des deux premières équipes sont partis l'un dans l'industrie et l'autre en Espagne.
Une raison scientifique derrière ce fiasco
Après un débat houleux au Parlement britannique, la création des hybrides avait finalement été autorisée et cette décision saluée de façon tapageuse. Quelques mois plus tard, il n'en reste rien. Ce ne sont pas des doutes sur l'éthique de ces recherches qui les ont remises en cause mais les progrès immenses accomplis sur la reprogrammation en cellules iPS. Le Guardian, autre journal britannique, l'affirmait déjà en janvier (voir ici). Il n'y a plus aucun intérêt scientifique à produire ces embryons hybrides, et les agences de financement l'ont bien compris. La France ferait une erreur stupide si elle autorisait ce type de recherche l'année prochaine lorsque la loi de bioéthique sera révisée.
La seule excuse pour ce type de recherche était de pallier la rareté des oocytes humains. Mais il est de très loin préférable de travailler avec des cellules reprogrammées qu'avec des cellules "hybrides".
Une raison scientifique derrière ce fiasco
Après un débat houleux au Parlement britannique, la création des hybrides avait finalement été autorisée et cette décision saluée de façon tapageuse. Quelques mois plus tard, il n'en reste rien. Ce ne sont pas des doutes sur l'éthique de ces recherches qui les ont remises en cause mais les progrès immenses accomplis sur la reprogrammation en cellules iPS. Le Guardian, autre journal britannique, l'affirmait déjà en janvier (voir ici). Il n'y a plus aucun intérêt scientifique à produire ces embryons hybrides, et les agences de financement l'ont bien compris. La France ferait une erreur stupide si elle autorisait ce type de recherche l'année prochaine lorsque la loi de bioéthique sera révisée.
La seule excuse pour ce type de recherche était de pallier la rareté des oocytes humains. Mais il est de très loin préférable de travailler avec des cellules reprogrammées qu'avec des cellules "hybrides".
mercredi 14 octobre 2009
Francis Collins et Eddy de Robertis à l'Académie Pontificale des Sciences
Francis Collins, le nouveau patron des National Institutes of Health américain (voir ici et là), vient d'être nommé à l'Académie Pontificale des Sciences. Ses positions en faveur de la recherche sur les cellules souches embryonnaires et sur d'autre sujets ne doivent pas faire oublier que c'est un immense chercheur qui est ainsi honoré, notamment en raison de son implication dans le décryptage du génome humain. C'est aussi le créateur de la Fondation BioLogos.
Eddy de Robertis est un biologiste du développement, un des tous premiers à avoir montré la conservation génétique des mécanismes du développement chez les animaux et par conséquent un fondateur de la discipline connue sous le nom d'évo-dévo, à l'interface entre développement et évolution.
Ils rejoignent de très grands noms et 29 Prix Nobel parmi lesquels les biologistes suivants :
1968 : Har Gobind KHORANA et Marshall Warren NIRENBERG (interprétation du code génétique)
1974 : George Emil PALADE et Christian DE DUVE (organisation de la cellule)
1975 : David BALTIMORE (liens entre virus et tumeurs)
1978 : Werner ARBER (découverte des enzymes de restriction)
1986 : Rita LEVI-MONTALCINI (découverte des facteurs de croissance)
1990 : Joseph Edward MURRAY (transplantation d'organes)
1999 : Günter BLOBEL (transport intracellulaire)
Eddy de Robertis est un biologiste du développement, un des tous premiers à avoir montré la conservation génétique des mécanismes du développement chez les animaux et par conséquent un fondateur de la discipline connue sous le nom d'évo-dévo, à l'interface entre développement et évolution.
Ils rejoignent de très grands noms et 29 Prix Nobel parmi lesquels les biologistes suivants :
1968 : Har Gobind KHORANA et Marshall Warren NIRENBERG (interprétation du code génétique)
1974 : George Emil PALADE et Christian DE DUVE (organisation de la cellule)
1975 : David BALTIMORE (liens entre virus et tumeurs)
1978 : Werner ARBER (découverte des enzymes de restriction)
1986 : Rita LEVI-MONTALCINI (découverte des facteurs de croissance)
1990 : Joseph Edward MURRAY (transplantation d'organes)
1999 : Günter BLOBEL (transport intracellulaire)
lundi 12 octobre 2009
La reprogrammation par la chimie ?
La reprogrammation de cellules différenciées en cellules iPS se fait en introduisant quatre gènes dans les cellules à reprogrammer. Un nouvel exploit technique (résumé de l'article dans Cell Stem Cell ici) vient d'être réalisé par une équipe d'Harvard, qui a démontré qu'on pouvait remplacer deux (Sox2 et cMyc) des quatre gènes par une molécule chimique baptisée RepSox (allusion à l'équipe de baseball des Red Sox basée à Boston) qui inhibe la voie de signalisation TGF-beta. Ceci ouvre la voie à l'éventualité d'une reprogrammation sans gène et donc sans risque : on pourrait en théorie produire des cellules reprogrammées de façon beaucoup plus sure.
De façon plus surprenante, cela démontre également qu'il existe plusieurs façons de reprogrammer des cellules puisque la voie du TGF-beta n'était jusque là pas connue comme étant impliquée dans ce processus.
Ce travail confirme une étude d'une autre équipe d'Harvard publiée le mois dernier dans Current Biology avec des résultats similaires.
De façon plus surprenante, cela démontre également qu'il existe plusieurs façons de reprogrammer des cellules puisque la voie du TGF-beta n'était jusque là pas connue comme étant impliquée dans ce processus.
Ce travail confirme une étude d'une autre équipe d'Harvard publiée le mois dernier dans Current Biology avec des résultats similaires.
vendredi 2 octobre 2009
Les Ig Nobel 2009 : la science qui fait (sou)rire
Les Ig Nobel sont des prix remis chaque année juste avant les Nobel, pour des recherches particulièrement loufoques. L'année dernière, il était question de sauts de puces. Cette année, parmi les prix, on découvre :
- qu'il vaut mieux se faire assommer avec une bouteille de bière à moitié vide que complètement vide, et c'est l'Ig Nobel de la paix !
- que les vaches qui ont des noms produisent plus de lait que celles qui n'en ont pas (j'aurais pensé que c'était seulement un indice de l'attention qu'on portait à la bonne santé des vaches !). C'est l'Ig Nobel de médecine vétérinaire.
- que la tequila peut être utilisée pour faire des films de diamants; Ig Nobel de chimie.
- qu'on peut faire craquer les doigts d'une main mais pas de l'autre pendant plus de 60 ans pour remporter l'Ig Nobel de médecine.
- et le meilleur pour la fin : pourquoi les femmes enceintes ne tombent pas en avant, Ig Nobel de physique avec un article dans Nature ! En résumé, ils ont démontré que les femmes présentaient une différenciation particulière des vertèbres lombaires, modification déjà présente chez certains australopithèques.
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